Le buisson ardent

Les portes

Nos architectes laissent nues les portes des églises. C'est qu'ils ne connaissent plus rien. Ils ornent les murs. Ils couvrent de dessins ou de sculptures les façades. Leur porte, sans prestige, n'est plus qu'un passage nécessaire. On en maintient, puisqu'il en faut bien, mais on se garde de les embellir. Ce ne sont à leurs yeux que fragments mobiles de la clôture.

Garde toi de franchir sans respect la porte d'une église. Rappelle-toi dans les basiliques romanes elles sont trois à la façade, trois au transept nord et trois au transept sud. Rappelle-toi les portails de Chartres : ils ont charge de répéter le nombre de Dieu. Éminente dignité de la porte ainsi attestée. Elle est entrée, elle est naissance. Tu l'as franchie et c'est un rite, le jour de ton baptême. Dans une parturience joyeuse l’Église t'a ainsi enfanté. « Nul, s'il ne naît à nouveau... » Voici la matrice par quoi renaître.

Aux portails de Chartres veillent des saints : l'ancien et le nouveau testament. Les travaux des jours et le zodiaque s'y inscrivent. Toute l'Histoire du Monde converge ainsi vers notre naissance à la Grâce : l'Histoire du monde, les saisons, nos efforts n'ont d'autre sens et d'autre objet que nous y mener. Les pas des légions romaines...

Aux porches de nos églises s'expriment plus encore que dans les nefs ou les absides des influences orientales. Paray-le-Monial, Charlieu, Avallon, l'arc trilobé de Saint Michel de l'Aiguille ou du petit portail de Lisieux. Tous les siècles, tous les orients. Aux portes de l'éternité, au-delà du christianisme et des hébreux, les Mésopotamie et les Perse sont assumées.

Porte, si noble que Marie en a reçu le nom dans ses louanges. Marie, la porte par quoi nous est venue la vie. La mère de Grâce, la porte qui ouvre le paradis. Ora pro nobis, janna coeli.

Vois, O mon fils, dans chaque porte d'église l'image même de Notre-Dame.